Par Frédéric d'Agay

En s’installant au château d’Agay (Var), après son mariage en 1892, l’épouse de Melchior d’Agay, qui devint ensuite une grande collectionneuse d’antiquités, d’argenterie surtout, fut frappée de stupeur en découvrant dans la cour de la ferme la fontaine des poules qui était un objet ancien… une terre vernissée de Biot! Elle s’empressa de la sauver en l’échangeant avec un bel abreuvoir moderne en métal.

Ce qui est intéressant est de connaître son origine : sans conteste, Biot, centre des terres vernissées et des fontaines de la Provence orientale depuis des siècles. La proximité d’Agay et de Biot le confirme : « En marge des jarres et des « terrailles de ménage », apparaît une production de fontaines d’intérieur très raffinées qui s’affirme rapidement comme une spécialité biotoise. Elle sous entend des rapports entretenus entre les potiers locaux et les centre faïenciers de Provence, en particulier Moustiers. »

Sa datation est plus problématique, fin du XVIIIe siècle ou début du XIXe ? J’attends les avis des connaisseurs ! Elle était destinée soit à la cuisine du château, car elle est trop simple pour figurer dans la salle à manger où se trouvait la classique fontaine provençale au dauphin de cuivre, soit celle de la ferme attenante au château et appelée le Cabaret. En effet le fermier vendait aux nombreux marins au commerce, patrons de tartanes, matelots des vaisseaux et galères de la Royale, qui relâchaient dans la rade d’Agay, à l’abri des vents ou pour faire aïguade, le vin blanc du domaine et donc en quelque sorte tenait cabaret dans la salle basse de cette vieille bâtisse du XVIIe siècle. C’est la salle de l’auberge décrite par Maupassant dans sa nouvelle Sur l’eau …

Elle a conservé son robinet, son bassin et son couvercle. Son décor est celui d’empreintes de feuilles couleur de la terre rouge ocre, recouvertes de vernis transparent sur fond d’engobe ou vernis à l’alquifoux de couleur crème, à marbrures jaunes typique de Biot. Le couvercle ou chapeau est aussi typique avec un décor de terre modelée torsadée. Que l’on retrouve sur les anses et sur le piédouche.

Le bassin est lui orné de trois mascarons, dont deux ont disparu : ils étaient probablement ajoutés et collés sur le bassin lui-même qui semble influencé par les bassins d’aiguières de Moustiers.

Ce bel objet est toujours en place à Agay et attend vos commentaires.